Relation client: misez sur votre capital humain en prenant appui sur la force de proximité du digital
En lisant l'édito de Marie Juliette Lievin sur les enjeux autour de la relation client cette semaine dans Stratégies, j'ai eu envie de d'apporter ma contribution à la réflexion et mon humble témoignage.
On ne parle plus que du potentiel des Chatbots en matière de servicing en ce moment. Facebook Messenger alimente nos discussions… Avec une réputation gonflée par l'effet de mode du moment, nous ne les avons pas encore vus beaucoup à l'œuvre même si nous savons tous que l'apport de l'intelligence artificielle bien drivée sera décisif. Voyages SNCF a déjà pris le virage et considère à raison qu'ils seront probablement les moteurs de recherche de demain. D'autres moins audacieux tremblent à l'idée de voir les datas de leur relation client partagés avec les GAFA…
Mais on entend assez peu parler de complémentarité des canaux. Comme à chaque fois qu'une innovation se présente, des POC sont lancés sans anticiper le rôle qu'elle pourra jouer (si elle survit au POC) dans le process plus global déjà en place ou comment elle bousculera ses organisations.
En matière de relation client, j'ai vécu cela de près avec l'avènement des médias sociaux en 2008, quand les entreprises ont réalisé qu'ils pouvaient être de puissants relais de proximité. À La Poste, après une longue phase immersion dans ce nouvel univers, sans bouée mais avec un masque, j'ai assez vite compris qu'ils ne seraient pas un énième canal de communication au service de nos campagnes push mais qu'ils représentaient une formidable occasion d'illustrer notre esprit de service en apportant de l'attention et des services personnalisés. Nous n'étions pas nombreux à être volontaires pour se jeter dans le grand bain. Il y a 8 ans, La Poste avait montré qu'elle était capable de se moderniser et de se transformer en adaptant son appareil industriel et en boostant ses engagements de service mais on faisait encore la queue dans les bureaux… Et certains disaient dans l'entreprise que c'était terriblement risqué d'engager la conversation sur ses nouveaux canaux, que le service client était là pour recevoir ce genre de signes de détresse au téléphone… Je vous laisse imaginer notre appréhension en installant notre premier compte sur Twitter.
Et pourtant… cette opportunité s'est révélée extrêmement riche en satisfaction client, pour l'image de nos services et indirectement pour notre performance business mais aussi en connaissance et meilleure appréhension des besoins de nos clients. Même si nous avons pris quelques claques au début, l'écoute, l'humilité, les solutions apportées ont vite transformé les gros râleurs en clients satisfaits et pour certains en ambassadeurs de la marque. Nous n'avons pas choisi de monter un plateau de community managers en doublure de nos plateaux de conseillers clients. J'étais persuadée que le social était une extension de leur métier et qu’il s'agissait d'expérimenter en avance de phase puis de les préparer, de les former, de les armer pour prendre ce virage digital. Et c'est ce que nous avons fait ensemble, experts du digital et de la relation client, avec le social servicing, le suivi des colis et des lettres déporté sur les médias sociaux, avec le click to chat, avec les FAQ dynamiques on line…
Avec le digital, c'est tout un métier qui se réinvente comme beaucoup d'autres dans l'entreprise avec le soutien et l'appui des experts. Et on découvre même (clin d'œil) que ces femmes et ces hommes de la relation client qu'on a longtemps considéré comme un centre de coût, à qui on a demandé des efforts de cost killing démesurés, pourraient être créateurs de valeur pour l'entreprise si on leur en donne les moyens en terme de formation et de conduite du changement. That's a good news!
On a longtemps en entreprise sacrifié ce dernier maillon essentiel de l'expérience client en l'offshorisant à moindre coût avec des résultats en terme de qualité de service déplorables. Pas étonnant de constater que les clients se soient immédiatement saisis du porte-voix social pour se faire entendre. Après une phase de destruction, on est aujourd'hui rentré dans une phase de reconstruction et de valorisation des femmes et des hommes qui participent en avant-vente, en SAV et en rebond au développement de l'entreprise.
Je suis convaincue que ni les chatbots, ni vos efforts en matière de self care ne les remplaceront. La complémentarité est la clé du succès. Ils se recentreront sur leur valeur ajoutée d'écoute, d'échange et d'empathie en prenant appui sur la force du digital pour apporter les solutions sur mesure que vos clients attendent et être au rendez-vous des engagements de votre marque.
Tout cela nous ramène bien à l'idée, comme l’écrivait Vincent Ducrey dans son dernier post LinkedIn, que la disruption digitale est un défi plus humain que technologique.
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