Tel Aviv, une ville prédisposée à devenir le paradis des trottinettes électriques
AFP
Cheveux au vent, téléphone à la main, en semaine ou pendant le shabat, ils sont de plus en plus nombreux à filer sur des trottinettes électriques le long d’Ibn Gvirol, axe qui traverse Tel-Aviv du nord au sud. Même le samedi, jour de repos sacré des juifs, quand tout tourne au ralenti, les petites roues foncent sur le macadam dégagé par un moindre trafic.
Matan Ben Ari, 28 ans, était du nombre le samedi précédent pour aller à la plage sans se préoccuper de son moyen de locomotion. « Il n’y a pas de transports publics et le taxi, c’est cher. Il reste cette solution. En plus, c’est un plaisir de rouler avec », dit-il. Le relâchement du week-end israélien ne fait que rendre plus visibles des engins qui, sur Ibn Gvirol comme sur les autres artères de Tel-Aviv et dans d’autres métropoles du monde, font concurrence aux vélos, pourtant bien établis. « C’est pratique, accessible. Tu es indépendant, tu peux faire ce que tu veux, t’arrêter, acheter de l’eau », explique Inbal, 20 ans, accoudée au guidon d’une trottinette.
Comme d’autres, la jeune femme a téléchargé sur son smartphone l’application d’un opérateur de trottinettes électriques partagées. L’application lui a indiqué sur une carte où trouver son prochain véhicule. « C’est facile» dit-elle, « je vais jusqu’à la mer, je m’arrête là-bas, je me sers de l’application, et c’est tout ».
« Le paradis des trottinettes »
La capitale culturelle et économique d’Israël semblait prédisposée à ce succès et ce business florissant: moderne, hyper-connectée, dynamique, ensoleillée, embouteillée… et plate. La société américaine Bird a été la première à déployer 2 500 trottinettes électriques en libre service à Tel-Aviv en août, suivie par les opérateurs Wind, Lime et Leo. Il y en a aujourd’hui environ 7 500 en circulation, toutes compagnies confondues. « La micro-mobilité était déjà importante (à Tel-Aviv) et Bird a accéléré le processus », dit Yaniv Rivlin, directeur général de l’entreprise en Israël.
Avec 60% des habitants âgés de moins de 40 ans, Tel-Aviv est « le paradis des trottinettes », assure-t-il. L’engouement n’est pas seulement générationnel. Dans cette ville congestionnée par la circulation, la trottinette, « ça change la vie» pour Adi Krispin, 43 ans. Il s’en sert au moins une heure et demie par jour, pour « emmener (sa) fille au jardin d’enfants, aller au travail, faire des courses », dit-il, juché sur son coursier de métal. « C’est difficile de plier un vélo pour le monter à la maison ou au bureau. Avec une trottinette, c’est simple ».
Nuisances
La municipalité de centre-gauche observe le mouvement a priori d’un bon oeil, dit Meital Lehavi, adjointe au maire en charge des transports. Cette vogue pallie une offre en transports publics qui « ne répond pas aux besoins réels des usagers », en particulier sous un gouvernement de droite faisant la part belle aux ultra-orthodoxes, observants rigoureux des règles du judaïsme et de l’interdiction de circulation des bus le week-end, dit-elle. L’impact environnemental aussi est « positif » dans une ville qui souffre de la pollution, ajoute-t-elle.
Cependant, comme d’autres, Tel-Aviv se débat avec les nuisances causées par cette prolifération. Meital Lehavi déplore le manque de pistes cyclables ou de bornes de stationnement. Les utilisateurs roulent volontiers sur les trottoirs et abandonnent leur trottinettes au milieu des allées, gênant les passants et pouvant même les mettre en danger, dit-elle. « C’est un phénomène nouveau que personne ne sait vraiment comment appréhender », admet-elle. S’inspirant d’autres grandes villes du monde, la municipalité a décidé de réguler l’usage. Elle a donné aux opérateurs jusqu’à mi-septembre pour mettre en place des stationnements dédiés à leurs équipements et partager leurs données sur l’utilisation des trottinettes avec la mairie.
Ces demandes sont « raisonnables », estime le directeur général de Bird qui compte bien augmenter sa flotte d’ici quelques mois. « Grâce aux trottinettes, il y a moins de voitures, et nous allons continuer à coopérer avec la municipalité pour poursuivre cette révolution dans les mois et les années à venir », dit-il.
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