Toshiba: le directeur général quitte le groupe, en crise permanente depuis 2015
AFP
Ancien fleuron industriel et technologique national dont les racines remontent à la fin du 19ème siècle, le japonais Toshiba est revenu dans une zone de fortes turbulences depuis une offre de rachat par CVC Capital Partners début avril. Pionnier des ordinateurs portables dans les années 1980, Toshiba est aussi célèbre pour avoir inventé les puces mémoires Flash NAND. Mais il a été ensuite rattrapé et distancé par la concurrence asiatique et les géants technologiques américains, avant de toucher le fond au milieu des années 2010 avec des scandales et des déboires financiers. Voici les grandes étapes de la saga mouvementée de Toshiba depuis 2015.
2015: scandale de comptes truqués
En avril 2015, Toshiba parle pour la première fois de soupçons d’erreurs dans ses comptes, avec des pertes sous-évaluées dans des projets d’infrastructures. Le scandale grossit démesurément les mois suivants: les comptes ont été enjolivés de plus d’un milliard d’euros au total dans plusieurs divisions du groupe entre 2008 et 2014 et ses dirigeants étaient impliqués dans cette fraude intentionnelle. L’action Toshiba s’effondre. Son PDG démissionne en juillet et une profonde restructuration est lancée en fin d’année, avec plus de 10 000 suppressions de postes dans le monde pour le groupe, qui compte près de 200 000 salariés à l’époque (125 000 en 2020).
2016: cessions et nouveaux ennuis
Obligé de se renflouer rapidement, Toshiba multiplie les cessions d’actifs. Il vend notamment à son compatriote Canon, son activité d’équipements médicaux et la majorité de sa filiale d’électroménager au chinois Midea. Le groupe subit malgré tout une perte nette record équivalente à 3,8 milliards d’euros sur son exercice 2015/2016. Fin décembre, coup de théâtre: Toshiba annonce de possibles dépréciations se chiffrant en milliards de dollars liées à sa filiale américaine d’équipements nucléaires Westinghouse.
2017: la débâcle Westinghouse
Westinghouse est mise en faillite fin mars. Les énormes dépréciations liées à son naufrage infligent à Toshiba une perte nette de 7,5 milliards d’euros sur l’exercice 2016/17. Le groupe risque d’être radié de la Bourse de Tokyo s’il ne redevient pas solvable rapidement. Toshiba se résout à vendre son joyau, sa filiale de puces-mémoires Toshiba Memory, mais la méfiance de son partenaire américain Western Digital/SanDisk freine le projet. Le groupe japonais boucle en fin d’année une augmentation de capital équivalente à quelque 4,5 milliards d’euros. De nombreux fonds activistes s’engouffrent dans la brèche.
2018: méga-cession de Toshiba Memory
La vente de Toshiba Memory à un consortium mené par le fonds américain Bain Capital est bouclée le 1er juin pour environ 18 milliards d’euros. Toshiba rachète toutefois 40% de son ancienne filiale, rebaptisée Kioxia. Toshiba a auparavant échappé à sa radiation de la Bourse de Tokyo en vendant Westinghouse et des droits de créances sur cette société. D’autres cessions d’actifs ont lieu et des restructurations supplémentaires sont annoncées. NuGen, la filiale britannique de Toshiba dans le nucléaire, est liquidée, et le groupe ne reste dans le nucléaire qu’au Japon, où il est notamment engagé dans le démantèlement de la centrale de Fukushima Daiichi.
2019-2020: les activistes haussent le ton
Toshiba continue à assainir ses finances et à réformer sa gouvernance, avec désormais une majorité de directeurs externes à l’entreprise dans son conseil d’administration. Mais les relations avec ses actionnaires activistes, qui veulent une progression plus rapide de ses performances et une stratégie de long terme plus lisible, se détériorent. La crise devient ouverte après l’assemblée générale ordinaire du groupe fin juillet 2020, où des irrégularités ont été constatées. Des actionnaires activistes réclament une enquête indépendante, la direction de Toshiba refuse.
2021: offre de CVC et démission du DG
Toshiba revient fin janvier sur le premier tableau de la Bourse de Tokyo, après des années de purgatoire. Lors d’une assemblée générale extraordinaire le 18 mars, les actionnaires activistes obtiennent gain de cause pour une enquête indépendante sur l’assemblée de juillet. La direction de Toshiba est humiliée. Le 7 avril, Toshiba annonce avoir reçu une proposition de rachat de la part de la société de capital-investissement CVC Capital Partners qui valoriserait le groupe japonais à près de 21 milliards de dollars, selon la presse.
Le soutien d’institutions financières japonaises proches de l’Etat paraît toutefois indispensable du fait de la présence de Toshiba dans des domaines sensibles comme le nucléaire. Le 14 avril, le directeur général du groupe, Nobuaki Kurumatani, démissionne, tandis que des offres de rachat concurrentes pourraient émerger, selon plusieurs médias.
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