
Vinted fait son entrée dans le luxe avec “House of Vinted”
Lancée comme une plateforme communautaire de revente de vêtements entre particuliers, Vinted amorce une inflexion stratégique majeure. Avec l’ouverture éphémère de son espace “House of Vinted” à Londres, accessible uniquement sur invitation, la licorne lituanienne explore un territoire jusque-là réservé aux marques de mode premium : celui de l’expérience physique, de la rareté et de la mise en scène de la désirabilité.
Le point de vente comme levier d’image
Si l’on ne pourra rien acheter sur place — les pièces présentées ne seront disponibles qu’en ligne à partir du 25 mars — la boutique n’a pas pour vocation première de vendre. Elle vise à incarner une montée en gamme symbolique, en capitalisant sur la force du retail physique. Ce dernier active des leviers émotionnels inaccessibles au digital : toucher, odeur, ambiance sonore, mise en espace… L’effort nécessaire pour s’y rendre, combiné à un emplacement soigneusement choisi, confère au lieu une forme de sacralisation. En communication de marque, ce type d’opération relève de la valorisation par le cadre : on ne vend plus un produit, on inscrit une marque dans une expérience.
Pression concurrentielle et érosion de croissance
Ce changement de posture intervient alors que Vinted voit sa dynamique de croissance s’émousser, notamment sous l’effet de la montée en puissance de l’ultra fast fashion. Des acteurs comme Shein, Temu ou Primark inondent le marché avec des produits à prix plancher, portés par des investissements massifs dans l’acquisition en ligne. Leur offensive détourne une partie du public jeune et sensible au prix, historiquement cible de Vinted. Dans ce contexte, la bataille de l’attention ne se joue plus uniquement sur le terrain de l’offre, mais sur celui de la perception.
La seconde main devient une industrie à deux vitesses
Plus largement, le marché de la seconde main est en pleine structuration. D’un côté, des start-up comme Faume permettent aux marques de mode (Sandro, Ba&sh, Isabel Marant) de reprendre la main sur la revente de leurs propres pièces. De l’autre, les géants du secteur, à l’instar de Vestiaire Collective, s’imposent à l’international avec une approche ultra-premium et un contrôle renforcé de la qualité.
Dans le bas du marché, la prolifération de vêtements issus de la fast fashion alimente les bacs de collecte et complexifie la chaîne logistique. Le coût de traitement, le tri et la remise en circulation devient un sujet économique à part entière.
De la plateforme transactionnelle à la marque aspirationnelle
Vinted semble opérer un glissement progressif : de la plateforme fonctionnelle à la marque de style de vie. En créant un lieu sans vente directe, accessible uniquement sur invitation, et relayé par un casting d’influenceurs soigneusement sélectionnés, l’entreprise adopte les codes de la communication de désir. Elle ne vend plus un produit d’occasion, elle raconte une nouvelle manière de consommer, plus consciente mais toujours aspirée vers le haut.
Reste à savoir si ce repositionnement symbolique sera suivi d’une évolution du modèle économique — ou s’il ne s’agit que d’un coup de projecteur ponctuel destiné à redonner du souffle à une croissance en perte de vitesse. Dans tous les cas, la seconde main entre dans une nouvelle phase de sophistication, où l’image compte autant que la fonctionnalité, et où la frontière entre luxe, circularité et stratégie de marque devient de plus en plus poreuse.
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