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Les mésaventures italiennes de Vivendi

Avec l'AFP

Le limogeage surprise de son protégé Amos Genish à la tête de Telecom Italia (Tim) représente un nouveau coup dur pour Vivendi, qui enchaîne les échecs dans sa campagne italienne destinée à créer des synergies avec Mediaset et Tim. « On a l’impression que ça s’enlise, ça fait maintenant trois ans que ça va de Charybde en Scylla, et on ne voit pas d’amélioration se profiler« , remarque Claire Barbaret, analyste pour Invest Securities, interrogée par l’AFP.

Vivendi avait espéré créer un géant latin des médias avec Mediaset, le groupe de la famille Berlusconi, après avoir déjà pris pied dans Telecom Italia. Mais le groupe français est désormais engagé dans un conflit acrimonieux avec le premier, tandis qu’il a perdu le contrôle du second en mai. Le fonds activiste Elliott, qui ne détient que 8,8% de Tim, a en effet ravi, lors d’une assemblée générale d’actionnaires, la majorité du conseil d’administration au nez et à la barbe de Vivendi, qui en est pourtant le principal actionnaire avec quelque 24% du capital.

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Révocation surprise d’Amos Genish

Les tensions se multiplient depuis. Le point culminant a été atteint mardi dernier, quand dix administrateurs « indépendants », figurant sur la liste d’Eliott, ont décidé la révocation surprise d’Amos Genish, qui dirigeait le groupe depuis 14 mois et est considéré comme un proche de Vincent Bolloré, le patron de Vivendi. Il a été remplacé par l’Italien Luigi Gubitosi, un spécialiste des restructurations.

Vivendi accuse Elliott de chercher à « démanteler » Tim. Les tensions portent notamment sur l’avenir du réseau de l’opérateur: Amos Genish voulait le fusionner avec la société Open Fiber d’Enel, à condition que Telecom Italia en garde le contrôle, tandis qu’Elliott plaide pour une disjonction, afin d’obtenir une meilleure valorisation au profit des actionnaires. « A long terme, dans une vision industrielle, ce n’est pas dans l’intérêt d’un opérateur historique de perdre le contrôle de son réseau fixe », commente Thomas Coudry, analyste chez Bryan, Garnier & Co, pour l’AFP.

Concurrence accrue

Elliott fait partie de la quinzaine de fonds activistes qui bousculent les entreprises à travers le monde, en prenant une participation au capital et en exigeant des directions qu’elles adoptent leurs « remèdes » pour dégager de juteux dividendes pour les actionnaires. En plus de la crise de gouvernance, Tim affronte une concurrence accrue: le géant italien de l’énergie Enel a créé un réseau de fibre optique, et l’opérateur Free (Iliad) a réalisé un démarrage fulgurant en Italie, en recrutant plus de 2,2 millions d’abonnés depuis juin, soit 4% de part de marché.

Tim, lui, a essuyé une perte de quelque 1,4 milliard d’euros au troisième trimestre, en raison de dévaluations massives. Or ces difficultés risquent de peser sur les comptes de Vivendi. « Ils ont une moins-value potentielle de 1,6 milliard d’euros« , analyse Claire Barbaret, en comparant le cours d’achat des titres à leur cours actuel de Bourse. « C’est une épée de Damoclès ».

Le plan de Vivendi

Le groupe de Bolloré ne semble pourtant pas envisager de céder sa participation. « Cette rumeur circule comme un serpent de mer depuis (…) mai 2015. C’est complètement faux. Vivendi est un actionnaire à long terme de Telecom Italia et nous allons le rester« , a déclaré jeudi le président du directoire, Arnaud de Puyfontaine. Vivendi entend même reprendre le contrôle du groupe italien. D’après un porte-parole du groupe français, le conseil d’administration de Tim va être obligé de convoquer une assemblée générale (AG) pour nommer de nouveaux commissaires aux comptes (dont le mandat s’achève le 1er janvier).

« Cette AG donnera aux actionnaires l’occasion de choisir entre deux projets: le démantèlement du groupe voulu par Elliott d’un côté, et la stratégie à moyen et long terme sur laquelle Amos Genish a été élu avec 98% des voix en mai », a-t-il argumenté. Mais le chemin ne s’annonce pas facile pour Vivendi, dont l’attitude passée, jugée arrogante et peu respectueuse des règles diplomatiques, n’a guère été appréciée de l’autre côté des Alpes. Fait plutôt inhabituel, le gouvernement de centre-gauche précédent avait même pris le parti d’Elliott, jugeant que le groupe français avait été un « très mauvais actionnaire ».

« Vivendi est monté en force dans Tim et surtout dans Mediaset. C’est une invasion dans des actifs qui ont un caractère assez affectif et même stratégique pour un pays« , note Claire Barbaret. « Chez Vivendi, ils sont contents de faire les choses en force, mais quand quelqu’un leur rentre un peu dedans, ils jouent les vierges effarouchées« . Selon Thomas Coudry, « cela vaut le coup de convoquer une AG s’ils ont bonne raison de croire qu’ils peuvent reprendre la main sur la stratégie et le board. Mais s’ils tentent et se ratent, ce sera pire que tout« .

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