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YouTube, nouvelle voix du monde agricole et de ses lobbys

Edition spéciale Salon de l'Agriculture 2025

Ils sont agriculteurs, éleveurs ou maraîchers et partagent leur quotidien sur YouTube et Instagram. De la Meuse à la Normandie, ces agri-youtubeurs se font les porte-parole d’un secteur souvent mal compris, mêlant pédagogie, engagement écologique et transparence sur les défis du métier.

Un lien direct avec le public

Dans la Meuse, Aurélien Masson conjugue élevage, culture céréalière et production de vidéos. À 28 ans, il jongle entre les soins aux animaux et les récoltes tout en alimentant sa chaîne YouTube, lancée en septembre 2024. En quelques mois, ses vidéos cumulent plus d’1,33 million de vues, preuve d’un engouement croissant pour le monde agricole.

D’abord présent sur Snapchat, il choisit YouTube pour une approche plus construite, à l’image de Thierry Bailliet et ses 116 000 abonnés, David Forge  avec 43 millions de videos vues, ou Gilles Van Kempen et ses 59 000 abonnés, qui, avant lui, ont fait de la plateforme un espace d’échange et de sensibilisation. Montrer la réalité du métier, sans filtre, en réponse aux nombreuses idées reçues, voilà son moteur.

Son quotidien au GAEC familial est au cœur de ses vidéos : travail des sols, entretien des équipements, défis climatiques… Autant de sujets abordés avec sincérité, pour lever le voile sur les coulisses de l’agriculture.

Une nouvelle manière de valoriser l’agriculture durable

Si YouTube permet de témoigner, il devient aussi un outil de promotion pour d’autres modèles agricoles. Goran et Hugo en sont l’exemple parfait (170 000 abonnés). À travers leurs vidéos, ils défendent une agriculture sans engrais ni pesticides, appliquée sur un terrain familial qu’ils ont récupéré il y a deux ans.

À l’origine, ils partagent leur expérience pour financer leur projet, mais leur succès dépasse rapidement leurs attentes. En quelques mois, plus d’un million d’abonnés les suivent, curieux d’apprendre à démarrer un potager sur un terrain vierge.

L’ampleur de leur audience attire des partenaires qui leur fournissent matériel et semences, leur permettant de limiter leurs dépenses. Une serre à 5 000 euros, des caisses de semences valant jusqu’à 1 000 euros : ces équipements sont financés en partie grâce à leurs collaborations. Leur chaîne génère aussi des revenus publicitaires, allant de 100 à 1 000 euros par vidéo, leur assurant un salaire modeste tout en finançant un employé.

Les réseaux sociaux, nouveaux alliés du monde agricole

L’essor des agri-youtubeurs montre une évolution majeure : l’agriculture s’émancipe des médias traditionnels pour parler directement au public. Transparence, pédagogie, valorisation du métier : les objectifs sont multiples, mais tous convergent vers un même enjeu réconcilier les agriculteurs avec la société.

Quand les lobbys agricoles investissent les réseaux sociaux

L’essor des « agri-youtubeurs » illustre une transformation majeure : l’agriculture s’affranchit des médias traditionnels pour s’adresser directement au public. Mais cette nouvelle visibilité attire aussi les acteurs industriels du secteur. Les lobbys agricoles ont bien compris l’influence croissante des créateurs de contenus sur les jeunes générations et les intègrent désormais dans leurs stratégies de communication.

Leur objectif ? Moderniser et rendre plus séduisante leur vision productiviste de l’agriculture auprès des 18-25 ans, une cible encore peu exposée aux réalités du métier. L’émission « On met les pieds dans le plat », animée sur Twitch par Samuel Étienne en direct du Salon de l’agriculture, en est une parfaite illustration. Parmi les invités, des influenceurs populaires comme Mariappymeal et Stervio, suivis par des centaines de milliers de jeunes, échangent sur le monde agricole aux côtés de représentants de la FNSEA et d’Intercéréales, un lobby influent de la filière céréalière.

Loin d’un débat contradictoire, l’émission offre une vitrine promotionnelle à l’agro-industrie, sans jamais questionner ses pratiques. Une absence de recul qui surprend certains participants, à l’image de Mariappymeal, qui ignorait l’identité des organisateurs avant d’accepter l’invitation.

Les influenceurs, nouveaux relais de l’agro-industrie

Ce cas est loin d’être isolé. Depuis plusieurs années, de grandes organisations agricoles multiplient les collaborations avec des créateurs de contenus pour rajeunir leur image. Les Produits Laitiers, par exemple, ont su capitaliser sur la popularité de vidéastes comme Mister V ou Inoxtag, générant des millions de vues sur leurs campagnes.

Intercéréales, de son côté, a récemment alloué 2,15 millions d’euros à une campagne de communication ciblant les 18-35 ans.

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