Simon Baldeyrou, DG France de Deezer: «Le marché était uniforme, nous voulons bousculer le modèle établi»
Apple a présenté hier, à l’occasion de sa Worldwide Developers Conference, un service d’écoute de musique en streaming pour 9,99 euros par mois qui sera disponible dans une centaine de pays. Alors que Spotify, lancé en 2006, revendique 16 millions d’abonnés dans le monde, Apple viserait, selon l’Associated Press, les 100 millions d’abonnés. Le Français Deezer affirme pour sa part en compter 6 millions. Simon Baldeyrou, le directeur général France de Deezer, détaille pour Frenchweb la stratégie de l’entreprise alors que le marché entre dans une nouvelle phase. (L’entretien a été réalisé quelques heures avant la présentation d’Apple).
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Frenchweb : Plus de dix ans après le lancement d’iTunes, qui a bouleversé le marché de l’achat de musique en ligne, Apple se lance dans le streaming. Sachant que la firme de Cupertino dispose de moyens financiers et marketing colossaux, craignez-vous son arrivée?
Simon Baldeyrou, directeur général France de Deezer: Au contraire, nous attendions avec impatience l’arrivée d’Apple. Depuis plusieurs jours, tout le monde parle du streaming, ce qui est une très bonne chose pour tous les acteurs du marché. L’arrivée d’Apple est un vrai coup de projecteur pour l’industrie, qui est d’autant plus marquant que le groupe américain est le principal acteur sur l’autre méthode de consommation: l’achat de musique.
Aujourd’hui, il y a trois façons de consommer de la musique: l’achat de CD, le téléchargement, et le streaming. Ce sont les trois principales sources de revenus pour les artistes, les maisons de disques, et toute la chaîne de l’industrie. L’arrivée d’Apple sur le streaming valide donc l’idée qu’avaient les fondateurs de Deezer en 2007.
Au-delà d’Apple, le Suédois Spotify aurait levé plus de 500 millions de dollars de fonds depuis son lancement, soit plus que Deezer qui a bouclé un tour de table de 100 millions d’euros en 2012. Quelle est la stratégie de Deezer pour affronter ces deux acteurs de poids?
Il y a de la place pour plusieurs acteurs. Peut-être pas une dizaine, mais au moins quatre ou cinq, et ce pour une raison principale: la musique n’est pas uniforme.
Jusqu’à présent, le marché l’était avec deux sociétés, Deezer et Spotify, qui se sont développées sur la base d’un seul prix unique, à 9,99 euros. Ce tarif est celui sur lequel tous les ayants droit et les plateformes se sont mis d’accord. Mais nous arrivons à bout de cette première phase.
Deezer et Spotify se sont développés sur la base d’un seul prix unique, à 9,99 euros. (…) Nous sommes prêts, dans les années qui viennent, à bousculer ce modèle établi.
Il va désormais y avoir de la place pour de nouveaux services, différents les uns des autres afin d’adresser différents segments de marché, que ce soit par pays ou par amateurs de musique. Chacun trouvera son positionnement. Nous sommes prêts, dans les années qui viennent, à bousculer le modèle établi. Apple a davantage de moyens, tout comme Spotify, mais les consommateurs sont capables de faire la différence entre les produits.
Mais justement, comment Deezer se différencie de Spotify ou d’autres acteurs ?
Notre catalogue est le plus fourni du marché car nous sommes présents dans tous les pays du monde, et nous avons récupéré beaucoup de catalogues locaux. Dans tous les pays du monde, les œuvres locales représentent plus de 50% des écoutes. L’ergonomie de notre service, nos outils de recommandation et notre offre éditoriale jouent également.
Dans les pays où nous sommes leaders, comme en France par exemple, l’essentiel des avant-premières est chez Deezer, avant les autres plateformes. Nos éditeurs travaillent à dénicher les dernières nouveautés, et nos équipes à améliorer les algorithmes de recommandation.
«Notre métier s’apprend tous les jours et c’est pour cette raison que de nouveaux acteurs, qui se sont lancés récemment, n’ont pas forcément rencontré le succès espéré»
Les podcasts ont fait leur apparition sur Deezer. Ce qui fera la richesse du service dans les prochaines années, c’est la complémentarité entre tous les contenus audios, qu’ils soient musicaux ou non, car cela correspond aux usages. Par exemple, les automobilistes sont habitués à écouter des émissions de radio pour basculer ensuite sur des programmes musicaux.
Notre métier s’apprend tous les jours et c’est pour cette raison que de nouveaux acteurs, qui se sont lancés récemment, n’ont pas forcément rencontré le succès espéré, car le catalogue ne suffit pas. Tout est dans le détail.
Crédit photo: Deezer.
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